Ce matin nous devons rentrer à Ahmedabad, on été censés partir en bus
mais finalement Bhavin décide d’emprunter la voiture de ses parents. Je ne sais
pas s’il a galéré pour négocier le prêt mais le fait est que nous sommes pris
en otage dans une grosse dispute entre Bhavin et sa mère, le pauvre est en
larme. C’est toujours embarassant ce genre de situation et c’est la première
fois en 3 jours qu’on entend la mère de Bhavin s’exprimer, elle qui était plongée
dans un mutisme ces derniers jours. Finalement, Bhavin fais volte face et nous
partons precipitamment, on a à peine le temps de dire au revoir aux parents.
Dommage que ça se termine comme ça.
C’est parti pour 250km tout aussi épiques que ceux des derniers
jours : slaloms pour éviter vaches et moutons, franchissements de
ruisseaux… Nous nous arretons pour visiter un dernier temple dédié à Krishna,
sa statue est énorme et tout est recouvert de marbre du sol au plafond.
A peine arrivés à Ahmedabad, dans la soirée, nous posons nos sacs et
partons rejoindre les amis de Bhavin pour assister à une projection de
courts-métrages indiens puis on part tous ensemble déjeuner chez Mickael avec
qui on avait bien sympathisé il y a quelques jours. Son appart a des allures
très européennes, il y a même 2 sofa, j’ai encore jamais vu ça en Inde. En même
temps Mickael possède des origines britanniques et il est chrétien d’où l’influence
occidentale. Un étudiant allemand se joint à nous, il vit ici depuis 6 mois et
s’éclate, c’est un féru de bouffe indienne, il m’épate. Je suis ravie de la
soirée, bonne ambiance, bonne compagnie et surtout j’ai enfin pu me goinfrer de
nourriture mangeable, une très bonne purée de gingembre sans oublier le vin. Ca
faisait un bail. Il est temps de quitter nos nouveaux amis et de rentrer car
demain nous partons vers Udeipur.
Le lendemain debout à 8h, je suis motivée pour partir vers notre
prochaine destination mais apparemment ce n’est pas le cas de Bhavin qui ne
semble pas vouloir se lever, il sait pourtant qu’on ne veut pas louper le bus
qui part en fin de matinée et a insisté la veille pour nous conduire à l’arrêt
de bus. On dirait presque qu’il fait tout pour nous retenir. Finalement c’est
un petit coup de gueule entre Rémi et moi qui le tirera de son lit, enfin du
sol. Je suis pas très fière mais au moins cette petite dispute s’est révélée
fructueuse.
Nous réservons un billet dans un bus Volvo, apparemment ce sont les
meilleurs en Inde, ils évitent de se fracasser la tête contre le toit à chaque
passage dans un nid de poule. On s’arrete dejeuner dans une pizzeria, toujours
aussi dégueu et il est déjà temps de partir. Un dernier au revoir à Bhavin, qui
semble bien triste, et Michael qui s’est aussi déplacé et nous voila partis
pour la ville blanche.
Après 5 heures de bus, nous
arrivons à Udaipur au crépuscule, nous sautons dans un rickshaw dont le
conducteur tres enthousiaste nous vantent les mérites de la plus belle ville
indienne selon lui. Le contraste avec les villes visitées precedemment est
assez saisissant. Fini les grandes avenues congestionnées, les klaxons
incessants qui agressent tellement les tympans, Udaipur surnomée la
« Venise de l’Orient » est plus bucolique, avec ses ponts en pierre,
ses maisons bigorées et ses lacs.
Le premier hostel que j’avais repéré etant
plein à craquer, nous devons nous rabattre sur un hostel que nous recommande
gracieusement notre chauffeur puisqu’il appartient soit disant à son cousin. Il
faut savoir qu’en Inde on ne dit pas amis ou potes mais cousins. Selon ses
dires, c’est le meilleur hotel de la ville, nous optons pour la chambre nommée « palace »,
mais visiblement elle n’en possède que le nom. Alors ok, la vue sur le lac est
imprenable, on peut admirer toutes les petites bicoques éclairées dans la nuit.
En revanche, la sdb laisse vraiment à désirer, les toilettes sont crades et
rudimentaires mais ça fera l’affaire pour cette nuit.
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La chambre "palace" |
Le lendemain, nous faisons
un petit tour des lieux avant de rester subjugué par l’hôtel d’en face, façade
faite de marbre ornée de fines décorations, nous sommes littéralement éblouis
par cet édifice immaculé par le puissant soleil, on ne tergiverse pas plus
longtemps et poussonsla porte. Le lobby affiche tout de suite la couleur, on
tape dans le luxe. Le
réceptionniste a l’air un peu médusé lorsqu’il nous voit ramené nos gros sacs à
dos avec les tapis de sol déjà bien usés. On nous fait visiter quelques chambres et prise d’un élan
d’émotion, je suis aux bords des larmes en apercevant une baignoire immaculée
et un pommeau de douche, réminiscence de mon cocon occidental, je suis aux
anges. Je ne suis pourtant pas fan de ce genre d’etablissement mais après les 2
semaines passées dans des conditions très minimales, j’avoue qu’un peu de
confort n’est pas un luxe. On reste raisonnable, on opte pour la chambre à 50 € tres confortable.
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retour momentané vers le confort |
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On se sent tout de suite immergés dans une autre ambiance,
ici les employés ne
lésinent pas sur les marques de politesse, ils nous
affublent de Monsieur/Madame 10 fois dans la même phrase, on ne rechigne pas
sur la clim mais il semble que les rapports humains ont aussi pris un coup de
froid.
Nous rejoignons notre
chauffeur de rickshaw de la veille, Jamal, qui nous attend pour une visite
guidée de la ville. Tres sympa et plutôt fier de nous montrer son guest book
avec les commentaires des touristes français qu’il nous demande de traduire.
Nous arrivons sur le promontoire d’un grand jardin d’où la vue sur le lac
Pichola et le City Palace est imprenable, celui la même qui a été rendu célèbre
grace à la pub de Schweppes. On enchaine avec un autre jardin abritant les
ruines d’une batisse dont les fenêtres naturelles donnent sur le lac couleur
émeraude. C’est magnifique.
Changement de décor avec le cénotaphe (lieu de
crémation) et le sanctuaire qui regroupe les tombes de plusieurs Maharaja.
Notre chauffeur
étant evidemment commissioné, il tient à nous amener visiter (et par la même
faire chauffer la carte de crédit) l’usine de textile artisanale. Nous avons
droit à toute une démonstration bien rodée des techniques utilisées pour
imprimer les motifs sur les textiles. On nous assure que tout est fait main et
exclusivement par des femmes, les hommes étant relégués au rôle de commerçant,
beaucoup moins épuisant en effet. Le travail est soigné et les tissus de bonne
qualité alors on se laisse tentés par quelques tentures, housses de coussin et
autre châle.
Jamal ne manque pas de
conversation, il nous bombarde de questions et reste sidéré lorsqu’on lui
apprend que nous ne sommes pas mariés, c’est inconcevable pour lui à notre âge.
Il nous raconte aussi toutes ses histoires « pseudo-inventées » avec
des touristes occidentales. Il nous explique avec un brin de fierté s’être fait
entretenir pendant un an par une anglaise tombée raide dingue de lui.
Pour la pause déjeuner, on
est conduit dans un restau où l’on s’empresse de nous dresser une table sur la
terrasse, visiblement nous sommes les seuls clients et le traitement qu’on nous
accorde est digne des plus grands rois, c’est un peu embarrassant mais
bizarrement on s’y fait vite ;-) Le repas est à la hauteur du service,
délicieux.
Toujours
en mode business, notre guide nous dépose dans une sorte d’atelier d’Art où 2
artistes nous décrivent leur travail tout en nous bombardant de questions sur
nos vies. Un des 2 est se montre assez provocateur et suffisant. Il nous
présente ensuite à son enseignant qui ne se gênera pas pour me draguer
lourdement tout en nous forçant la main pour acheter leurs productions dont les
détails et la minutie sont assez impressionants. En bons touristes nous
repartons avec 2 peintures sur soie et 2 grains de riz gravés de nos prénoms.
Epuisés, nous rentrons dans
notre bulle 3 étoiles. On mate un film avant de tomber dans les bras de
Morphée.
La nuit a été un vrai
calvaire, j’ai des frissons et je souffre de crampes d’estomac. J’ai beau
tenter de me vider mais en vain, je ne vais pas mieux. Je ne peux pas vraiment
poser de diagnostic mais vu mon régime des 15 derniers jours se limitant à
quelques bananes et du jus de mangue, mon organisme souffre clairement de
carrences et désequilibres.
Je m’arme de courage pour
rejoindre la salle des ordinateurs afin d’envoyer quelques emails (le wifi
n’est pas de mise malgré le luxe) mais une fois assise, il ne s’écoule que quelques
minutes avant que je me sente vaseuse et prise de vertiges. Je retourne tant
bien que mal dans la chambre et m’effondre sur le lit, ma tension a atteint des
niveaux abyssaux.
Je suis contrainte de
passer la journée en position horizontale, dès que je me lève, ma tête tourne
et je perds tout sens de l’équilibre, je rampe pour me rendre aux toilettes. Ca
devient inquiétant, je regrette presque de ne pas avoir une bonne tourista. Est-ce
une sorte de sentence de la part d’une divinité qui me dit « hey ma
p’tite, je te rappelle que le luxe n’est pas censé faire partie du voyage
spirituel ! ». Rémi n’a pas la
grande forme non plus, un rhume carabiné le clou aussi au lit. Nous ne pourrons
pas assister au coucher du soleil avec Jamal qui ira même jusqu’à se procurer
le numero de notre chambre, il lâche pas l’affaire le petit.
Le lendemain matin, avant
de me lever, j’entends une voix dans ma tête qui me suggère de manger du
chocolat noir, heureusement que j’en avais achété à Amhdabad. Une fois le carré
de noir corsé ingurgité, je me sens littéralement revivre, un vrai miracle, c’était
donc ça dont j’avais besoin, une bonne dose de magnésium. J’ai reste encore
sidérée par ce message transcendant. Merci mon ange gardien !
Apres un petit déj sur le
toit terrasse au bord de la piscine, nous quittons notre 3 etoiles, sans en
avoir vraiment profité mais c’est toujours plus agréable d’être malade dans un
environnement confortable. Nous partons arpenter quelques ruelles avec son
bazar fourmillant qui abondent d’échoppes d’étoffes à saru, de grains et
d’épices parfumées. Nous achetons nos billets de train pour demain vers notre prochaine
destination Agra. Il vaut mieux toujours acheter ses billets quelques jours à
l’avance au risque d’être bloqué pour continuer par manque de place. Sur le
point de monter dans un rickshaw à la recherche d’un autre hostel pour passer
la nuit, une soudaine intuition me mène à aller jeter un coup d’œil à l’hostel
qui m’a interpéllée. Bonne pioche, l’hostel est parfait et en plus la gérante
Cécile est française, expatriée ici pour rejoindre son copain indien depuis 2
ans. Je préfère de loin une ambiance cosy et des conversations enrichissantes
au luxe occidental. La partie pour se restaurer est le lieu où a été tourné le
James Bond-Octopussy. Cécile m’affirme qu’elle a briefé son personnel en
cuisine pour qu’ils respectent au mieux les regles d’hygiene rudimentaires
alors je me laisse tentée et je ne regrette pas, c’est délicieux et pas trop
épicé, je revis ! Je pense être guérie, je passe la soirée à rattraper le
retard sur mon blog.
Un bon p’tit déj avalé avec
des toasts au Nutella, si si, je décide de me rendre dans un cybercafé mais à
peine sortie de l’hostel, je suis assaillie par une grappe de jeunes males
indiens dont j’aurais du mal à me débarasser, je ne comprendrais plus tard la
raison de cette agitation.
Je recontacte
le CSurfer Nitin que nous étions censés rencontrer plus tôt mais notre etat de
santé nous en avait empeché. Apres avoir déjeuné (yes ! on refait 3 repas/jour)
nous nous faufilons dans les ruelles en terre battue où les rickshaws et les
voitures se disputent pour se frayer un passage, un vrai cocktail de pollution
sonore et atmosphérique. Relans de Mumbai.
Lassée, je repars
dans mon havre de paix où j’engage une longue conversation avec Cécile avant de
réaliser qu’il est déjà temps de rejoindre Nitin. Ponctuel, celui ci arrive
devant l’hostel sur sa moto et reviens 10 minutes plus tard avec sa voiture
pour nous faire visiter la ville, du moins revisiter. Visiblement, il
appartient à la classe plutôt aisée. Il est tres sympa et tient une agence de
tourisme donc il n’hesite pas a nous inciter à lui faire de la pub. On convient
de se voir le lendemain pour aller visiter un lieu plus authentique dans la
nature.
Je récupère mon linge
« propre » dont les lavandières se sont chargées mais reste déconfite
en voyant l’etat de mon Levi’s, il a du être torturé pour se retrouver dans cet
état là, il ne rentrera pas en France celui là.
Aujourd’hui est notre
dernière journée à Udaipur, je prends mon p’tit déj sur la Terrace et consacre
la matinée à l’écriture du blog en compagnie de Cécile. Nitin nous récupère moi
et Rémi en début d’aprem direction le Mansoon Palace qui surplombe la reserve
naturelle. Apres avoir roulé sur une route sinueuse et pentue, la vue panoramique
sur la ville et ses lacs est imprenable. Les couleurs et les arbustes
environnents nous rapellent fortement la Provence, c’est salvateur de ne plus
subir tous ces décibels de klaxons.
De là, nous partons nous immerger dans la vie traditionnelle du Rajahstan. La
visite de ce petit village authentique n’est tout de même pas épargnée du côté
mercantile touristique. Au détour de petites huttes faites de terre glaise et
de toit de paille, ils insistent pour nous vendre des petits pots de terre
cuite ou autres objets artisanaux. Ils ont un sacré bagou mais avec le temps,
on a appris à devenir fermes. On a beaucoup aimé cette visite, je me serais
presque crue en Afrique.
De retour à l’hostel, nous
bavardons un long moment sur la terrasse avec Cécile qui nous qui comblent un
peu plus nos lacunes sur la culture indienne et nous explique notamment le
comportement des jeunes indiens. Ne pouvant pas avoir de relations sexuelles
avant de se marier, ils poirotent devant les hostels de backpackers remplis
d’occidentaux avec l’espoir qu’une d’entre elles se laissent tenter. Mouais,
c’est pas tres gratifiant. Dans l’attente se voir présenter leur future femme
choisie préalablement par la famille, ils restent parfois vierges jusqu’à 23
ans.
De toute façon, les
indiennes ne sortent de la maison familiale que pour aller étudier, du moins
lorsque elles ont accès à l’enseignement.
Ca explique pourquoi les
mecs me dévisageaient de façon insistante. L’Inde est décidemment pleine de
contradictions : bizarrement ici, montrer ses épaules découvertes choque
beaucoup plus que de montrer son ventre. Ils jettent leur détritus partout mais
réparent systematiquement tout objet ce qui est assez écolo mais finalement
c’est plus par soucis matériel.
Nous quittons l’hotel et
notre irréprochable hôte pour rejoindre la gare où Nitin est déjà sur le quai
pour nous dire un dernier au revoir. Il check les listes et s’assure que nous
avons les bons sièges, c’est de l’assistance 3 étoiles. On ne sait pas quoi
penser, on a tellement entendu dire que les indiens étaient fiers d’être
escorté d’occidentaux que je doute un peu de la sincérité de tous ses gestes
d’attention. On verra avec le temps..
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